LE MÉTRO DE FULGENCE BIENVENÜE

La première ligne de métro, Porte de Vincennes – Porte Maillot, est inaugurée le 19 juillet à l’occasion de l’Exposition universelle de 1900. Celle de 1889 avait coïncidé avec la construction de la Tour Eiffel. Le père du métro, qui fait de Paris une des villes les plus modernes du monde, est l’ingénieur Fulgence Bienvenüe. Les années qui suivent voient naître les lignes 2 et 3, puis la 4 qui représente un défi technique : la traversée de la Seine. À chaque époque, la réalisation des transports souterrains, qui couvrent des espaces de plus en plus larges, exige des innovations technologiques permanentes. La photo, qui représente la construction de la ligne 9 vers 1930, évoque l’atmosphère d’un tunnel de mine. On va voir combien la technique de percement des tunnels a fait des pas de géant…

LE GRAND PARIS EXPRESS EST LANCÉ

Le réseau du métro parisien « intra-muros » est très dense. Mais le développement urbain de la région, avec ses quartiers d’affaires, ses villes nouvelles, ses aéroports imposait une organisation qui relie mieux le centre à sa périphérie et les zones périphériques entre elles. En 2010, le Parlement français lance le défi de transformer la région parisienne en une métropole d’envergure mondiale. Au cœur de cette ambitieuse démarche politique, un projet d’infrastructures : la création de quatre nouvelles lignes de métro : 15,16,17,18. Ce nouveau réseau, baptisé Grand Paris Express, est géré par la Société du Grand Paris. Les prolongations des lignes 11 et 14 (pour laquelle Bouygues Travaux Publics a réalisé le lot 2 de l’extension Nord pour le compte de la RATP) et celle vers l’Ouest du RER Eole (pour le compte de SNCF Réseau) viennent compléter le projet du métro circulaire.

LA LIGNE 15 SUD

Le long de ses 33 kilomètres, la ligne 15 Sud traversera 22 communes et concernera plus d’1 million d’habitants. Une grande partie de ses gares sera en correspondance avec des lignes de RER, métro, tramway et/ou transports en commun déjà existants. Elle contribuera à alléger les lignes de transports qui desservent le Sud de la métropole parisienne et à désengorger le trafic sur ses principaux axes routiers, tout en offrant un gain de temps important aux Franciliens. Elle améliorera également l’accessibilité à des équipements publics majeurs tels que l’Institut Gustave-Roussy à Villejuif, le Musée d’art contemporain à Vitry-sur-Seine et l’hôpital Henri-Mondor à Créteil. Sa mise en service est prévue courant 2025. À l’horizon 2030, avec ses futurs tronçons Ouest et Est, elle formera une grande rocade de 75 kilomètres tout autour de la capitale.

LA PREMIÈRE GARE DU GRAND PARIS

Menés à l’intersection des communes d’Issy-les-Moulineaux, Vanves, Clamart et Malakoff, les travaux de la gare de Fort d’Issy – Vanves – Clamart (lot T3B) inaugurent la construction des 68 prochaines stations du Grand Paris Express. Le projet est complexe car il a fallu concevoir une partie de la structure souterraine sous les voies de la ligne N du Transilien qui relie Paris-Montparnasse à l’Ouest parisien, tout en maintenant celles-ci opérationnelles. Les travaux de terrassement de ce chantier ont été confiés par le groupement Horizon à Tedelis, une joint-venture composée de Bouygues Travaux Publics et de Cosson, filiale spécialisée de Colas. À l’intérieur de la gare de Fort d’Issy – Vanves – Clamart, l’ouverture permettra le démontage des deux tunneliers qui arriveront à leur destination finale en 2020 et 2021.

LIGNE 15 SUD LA NAISSANCE DE LA « BOÎTE GARE »

Après les fondations souterraines de la future gare, il a fallu procéder à une opération délicate : le ripage de la dalle en béton armé pour fermer et recouvrir le haut de la structure. Il a fallu redoubler d’ingéniosité pour déplacer une dalle de 7 000 tonnes (soit le poids de la tour Eiffel) en un temps record (100 heures). Une opération d’une grande précision, réalisée par le même partenaire qui a secondé Bouygues Travaux Publics à Tchernobyl lors du ripage du dôme de l’enceinte de confinement de la centrale. Bouygues Travaux Publics a achevé le creusement de la “boîte gare” qui affiche des dimensions exceptionnelles : 110 mètres de long, 26 mètres de large et 26 mètres de profondeur. Le groupement reprendra les travaux de gros œuvre une fois les 2 tunneliers provenant d’Est et d’Ouest arrivés à leur destination finale, respectivement en 2020 et en 2021. Il s’agira alors pour Bouygues Travaux Publics d’aménager 4 étages et d’installer les quais du futur métro au niveau inférieur.

LA « MÉTÉO DES CHANTIERS »

La Société du Grand Paris met en œuvre plusieurs actions innovantes pour limiter l’impact des nuisances dues aux travaux sur le quotidien des riverains. Parmi elles, la “météo des chantiers” à consulter sur son site, qui donne un indice sur le niveau sonore de la zone de travaux, avec une prévision à 10 jours. Un module relié à des capteurs sonores couplés à une caméra permettant de localiser la source de bruit. La gare de Fort d’Issy – Vanves – Clamart a été la première à mettre en place ce service, qui sera déployé sur tous les chantiers du Grand Paris Express. Une démarche aussi adoptée par le groupement Horizon. Des bâches acoustiques ont été installées sur les palissades des chantiers de la ligne 15 Sud, pour absorber le bruit. À cela s’ajoutent la sensibilisation du personnel et le capotage systématique du matériel pour atténuer le bruit des moteurs. Pour encore s’améliorer, Bouygues Construction et Colas ont investi, via le programme d’intrapreneuriat du groupe Bouygues, dans une solution novatrice : Com’in. Elle propose une plateforme d’analyse et de maîtrise en temps réel des nuisances liées au bruit, aux poussières et à la mobilité grâce à l’intelligence artificielle.

LIGNE 15 SUD LE TRONÇON DE TOUS LES CHALLENGES

Situé au sud-est de Paris, le lot T2A traverse 5 communes entre Villejuif et Créteil. Les travaux attribués au groupement Horizon portent sur la construction de 4 gares (Créteil l’Échat, Le Vert de Maisons, Les Ardoines et Vitry Centre), plusieurs ouvrages annexes, la réalisation de 7,7 kilomètres de tunnels, ainsi qu’un puits d’entrée pour l’installation des tunneliers sur la friche Arrighi (Vitry-sur-Seine). Particularité : la nature des sols variés et complexes nécessite des techniques bien particulières de confortement des sols. À la limite d’Alfortville et de Maisons-Alfort, la gare du Vert de Maisons se situe près des voies ferrées de la Ligne à Grande Vitesse Paris- Lyon-Marseille et du RER D, dont elle assurera la correspondance avec la ligne 15 Sud. Une partie de la “boîte gare” est construite sous des bâtiments des années 30 et classés aux monuments historiques. Une proximité qui complexifie la réalisation de l’ouvrage. Construite à l’abri de parois moulées de 74 mètres de profondeur et en creusement traditionnel pour sa caverne, la gare du Vert de Maisons nécessitera le recours à des techniques de congélation et d’injection pour assurer le maintien des sols.

LE TUNNELIER, L’ARME
« TOUT TERRAIN »

Sur le terrain de la friche Arrighi à Vitry-sur-Seine, le groupement a creusé un puits de 50 mètres de profondeur, qui sert au lancement de deux tunneliers. Le premier, baptisé Aby, est parti en juin dernier en direction de l’Ouest (Villejuif-Louis Aragon) et Marina a démarré sa course fin décembre vers l’Est (Créteil l’Échat). Ces gigantesques machines de 9,87 mètres de diamètre extérieur et de 122 mètres de long creuseront respectivement 4,3 kilomètres et 2,8 kilomètres au rythme de 12 à 16 mètres par jour. Soit 300 mètres par mois. Compte tenu de la nature des sous-sols et de ses spécificités géologiques, la technique de forage retenue ici nécessite d’utiliser un tunnelier à pression de boue à densité variable.“Comparativement à d’autres tunneliers, ce modèle est mieux adapté à la nature du terrain très perméable et peu dense”, observe Benjamin Kitzis, directeur Production tunnels pour Bouygues Travaux Publics.

LIGNE 15 SUD– LA TRAVERSÉE DE
LA SEINE

Le lot T3A est situé à l’extrémité Ouest de la ligne 15 Sud et traverse les communes de Sèvres, Boulogne-Billancourt et Issy- les-Moulineaux. Le groupement Horizon réalisera 4,2 kilomètres de tunnel, deux gares et plusieurs ouvrages annexes, ainsi qu’un puits de lancement pour le tunnelier. La ligne souterraine passera trois fois sous la Seine. À la différence du lot T2A, le groupement a recours ici à un tunnelier à pression de terre. “La surface de la zone de lancement étant très exiguë, nous n’avions pas la place pour installer une usine de traitement de boue, indique Richard Desvignes, responsable Matériel tunnels chez Bouygues Travaux Publics. Contrairement au tunnelier à pression de boue, les déblais sont récupérés par un tapis convoyeur depuis le fond du puits jusqu’à la barge en Seine.

CAP À L’OUEST POUR EOLE

Aux pieds de La Défense, Bouygues Travaux Publics doit creuser un tunnel de 6,1 kilomètres qui reliera le quartier d’affaires à la gare Haussmann – Saint-Lazare et prolongera le RER E (Eole) vers l’Ouest. Une nouvelle gare située au cœur de la Porte Maillot est également au programme. Dans l’avenue Gambetta, à Courbevoie, les équipes ont creusé un puits de plus de 38 mètres de profondeur pour laisser entrer le tunnelier. Baptisée Virginie, le tunnelier tient son nom de Virginie Blivet, assistante (au moment du baptême) du directeur du projet chez SNCF Réseau. C’est la machine la plus grande actuellement en cours d’utilisation à Paris, avec ses 90 mètres de longueur et ses 11,1 mètres de diamètre. Elle a été spécialement conçue pour ce chantier, réalisé en zone très dense, en collaboration avec les équipes du constructeur allemand Herrenknecht. Le tunnelier avance de 8 à 16 mètres par jour. Le chantier Eole est confié à un groupement conduit par Bouygues Travaux Publics avec Razel-Bec, Sefi-Intrafor, Eiffage Génie Civil et Eiffage Fondations pour un montant de 600 millions d’euros.

LE TRAITEMENT DES BOUES

La nature du terrain a conduit Bouygues Travaux Publics à opter pour un tunnelier à pression de boue. Ce type de machine maintient une pression de boue au front : il est donc nécessaire d’injecter en permanence à l’avant du tunnelier de la bentonite, une boue à base d’argile. Les boues évacuées par le tunnelier sont acheminées jusqu’à cette base provisoire de 180 mètres de long, par une conduite de marinage hydraulique. Cette installation d’envergure, qui traverse Courbevoie, permet d’éviter les quelque 250 camions par jour qu’aurait nécessité l’excavation des 1,3 million de tonnes de déblais que le tunnelier extraira. La machine fonctionne en circuit fermé, les boues sont évacuées par la conduite de marinage jusqu’à la Base Seine où elles sont filtrées et traitées dans d’immenses cuves, afin d’être réutilisées par le tunnelier. Les déchets résiduels sont évacués par barge. 2 500 m3 par heure de bentonite sont gérés par la station, l’équivalent d’une piscine olympique. Située en face du Temple de l’Amour, un bâtiment de l’Île de la Jatte classé monument historique, la Base Seine a dû être peinte en vert à la demande des architectes des bâtiments de France.

UNE NOUVELLE GARE À PARIS

“Ce qu’il y a de stimulant avec ce projet, c’est la variété des travaux qu’il y a à réaliser. Quasiment toutes les techniques de génie civil sont utilisées”, explique Philippe Vaillant, directeur du projet. La nouvelle gare de la Porte Maillot est à elle seule un défi technique et aussi organisationnel. En effet, elle jouxte plusieurs infrastructures : la ligne 1 du métro parisien, le RER A, le parking du Palais des Congrès et l’actuelle gare du RER C, mais aussi le boulevard périphérique. Il s’agit de l’une des portes d’entrée de la capitale, un environnement urbain d’une densité exceptionnelle. La gare sera composée d’un hall à ciel ouvert doté d’une grande verrière sur six niveaux, et d’une gare souterraine de 70 mètres de long et de 15 mètres de large. Creusée sous le rond-point de la Porte Maillot, l’édifice nécessite la mise en œuvre de parois moulées de 35 à 53 mètres de profondeur. Des halls de correspondance avec la ligne C, le Palais des Congrès et la ligne 1 sont également au programme. Ouverture au public prévue en 2022.